Vendredi 13 juin, la Halle de la Brasserie à Rennes a accueilli la deuxième édition des Rendez-vous de la Relocalisation, un événement structurant porté par la Région Bretagne, qui a réuni plus de 100 acteurs économiques autour d’un enjeu stratégique : faire de la relocalisation un levier de résilience, de développement territorial et d’innovation durable.

Souveraineté, emploi et ancrage territorial : une ambition portée politiquement
Dans son discours d’ouverture de ce rendez-vous de la relocalisation, Loïg Chesnais-Girard, président du Conseil régional, a rappelé l’urgence d’agir dans un contexte géopolitique et environnemental instable. Il a appelé à « dessiner et penser l’avenir de la Bretagne », insistant sur la nécessité pour la Région de jouer un rôle actif en Europe face aux nouvelles formes de protectionnisme.
De son côté, Loïc Hénaff, conseiller régional délégué à la relocalisation d’activité, au fret et à la logistique, a posé les bases : relocaliser, ce n’est pas se replier sur soi, mais renforcer la robustesse de notre tissu économique. Il a évoqué les outils existants et souligné le lien direct entre achats locaux et innovation. L’étude Reloc’h publiée en 2021, avait en effet mis en lumière plusieurs bénéfices. En relocalisant une partie de ses achats, la Bretagne peut réduire de 4 millions de tonnes les émissions de CO2, générer quelque 130 000 emplois et apporter 5,3 milliards d’euros de CA supplémentaire à horizon 2030.
Achats publics, associations et consommation locale sont les piliers de la relocalisation
- Anne-Claire Pons, directrice de Produit en Bretagne, a mis en lumière l’essor du « locavore » : 28 % des consommateurs bretons achètent local par civisme, 25 % pour la confiance et 23 % pour la qualité. Elle appelle à faire émerger des champions régionaux, notamment parmi les 40 entreprises bretonnes labellisées ISO 26000.
- Simon Uzenat, conseiller régional en charge des achats publics, a présenté le SPASER de la Région Bretagne, schéma visant 80 % d’achats locaux d’ici 2025. Il prône un sourcing inversé, évoque la centrale d’achats bretonne Breizh Achats, et appelle à revoir nos politiques d’achat selon des logiques de sobriété et de valeur créée localement.
- Arnaud Toudic, conseiller régional délégué à la vie associative a, quant à lui, défendu le rôle majeur du tissu associatif (80 000 associations en Bretagne) : 96 % de leurs achats sont locaux, générant 107 000 emplois non délocalisables. Une étude viendra prochainement objectiver leur impact.
Réinterroger nos besoins : l’économie circulaire comme boussole
Emmanuelle Ledoux, directrice de l’INEC (Institut National de l’Economie Circulaire), a livré une intervention percutante sur les limites du modèle linéaire. Malgré des textes comme la Loi anti-gaspillage, le passage à l’échelle reste timide. Elle invite à dépasser le modèle du jetable, assumer la relocalisation de certaines productions et construire des écosystèmes territoriaux de circularité.
Souveraineté et sécurisation des approvisionnements (Table ronde 1)
Les témoignages ont mis en évidence les gains en robustesse pour les entreprises engagées :
- Naval Group (90 % de ses achats en France) agit pour la résilience de la défense nationale.
- La Maison d’Armorine rapatrie ses achats et intègre des solutions de valorisation des déchets (ex. le papier de glaçage des emballages bonbon transformé en isolant).
- Sodimac, PME costarmoricaine, a relocalisé massivement depuis la crise Covid, avec 90 % d’achats en France et l’internalisation d’achats autrefois effectuée loin de l’entreprise.
- Hervé Kermarrec, (président du MEDEF Bretagne,) a appelé à renforcer la compétitivité locale, tout en rappelant que la relocalisation est économiquement viable jusqu’à un écart de 20 % avec les produits importés.
Les retombées économiques de la relocalisation (Table ronde 2 )
Alan Fustec, dirigeant de (Goodwill Management,) a plaidé pour une triple comptabilité : économique, sociale et environnementale. La relocalisation n’est pas seulement un coût mais un investissement générateur de retombées durables. Une formation TCO est prévue dès septembre 2025.
Xavier Dutertre, président des (Céramiques de Cornouaille), a présenté le cas exemplaire de relocalisation des fameux bols à oreilles. Ce projet, né durant la crise sanitaire, a permis de créer un atelier moderne à Quimper, passant de 4 à 23 salariés et recréant toute une filière faïencière.
Impacts sociaux et environnementaux des achats responsables (Table ronde 3)
- Capitaine Cosmétiques cherche chaque jour des fournisseurs locaux tout en s’engageant pour le zéro emballage et l’inclusion via des établissements ou services d’aide par le travail ( ESAT).
- Pauline Lemeu (Pôle ESS Auray) rappelle que l’ESS représente une force économique considérable en Bretagne (14 000 salariés) et que ces différentes structures possèdent des compétences diversifiées, qui peuvent être mobilisées par des entreprises de l’économique classique.
- Jacqueline Roizil (ADEME) insiste sur l’approche par la sobriété et l’écoconception, en soulignant l’intérêt d’une comptabilité carbone multicritère.
Un élan collectif à amplifier
Ce second rendez-vous a mis en lumière une conviction partagée : la relocalisation est une opportunité stratégique pour renforcer la souveraineté, l’emploi local, l’innovation et l’impact environnemental. Qu’elle passe par les achats publics, les pratiques industrielles ou l’engagement des associations, elle exige une mobilisation transversale des acteurs.
La relocalisation par les achats n’est pas toujours simple et facile mais les initiatives bretonnes démontrent que l’impulsion est là. Plus qu’un enjeu économique, la relocalisation devient un levier concret de transformation territoriale.
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