L’évolution réglementaire européenne autour du reporting extra-financier connaît une nouvelle inflexion avec la Loi Omnibus de février 2025, qui vise à simplifier l’application de la CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive). Cette simplification ne remet toutefois pas en cause l’importance des critères ESG (environnementaux, sociaux et de gouvernance) dans la stratégie des entreprises. Au contraire, elle encourage une approche plus pragmatique et accessible, en particulier pour les PME. Dans ce contexte, les achats responsables et les achats locaux restent des leviers stratégiques pour répondre aux objectifs de durabilité, tout en maintenant la compétitivité des entreprises sur le territoire.

CSRD, késako ?
La CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) est une directive européenne adoptée par le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne, entrée en vigueur le 1er janvier 2024. Dans son état initial, elle visait à renforcer et harmoniser les obligations de reporting extra-financier des entreprises. Elle s’adressait aux grandes entreprises répondant à au moins deux des trois critères suivants : un chiffre d’affaires net supérieur à 50 millions d’euros, un total de bilan supérieur à 25 millions d’euros, ou 250 employés ou plus.
Son objectif était d’inciter ces entreprises à évaluer et publier leurs impacts environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) via une double analyse de matérialité (financière et d’impact) et un reporting conforme aux normes européennes (ESRS – European Sustainability Reporting Standards).
Directive Omnibus : où en sommes-nous ?
La directive Omnibus, adoptée en février 2025, vise à simplifier la CSRD. Seules sont désormais concernées les entreprises de plus de 1 000 salariés, réalisant plus de 50M€ de chiffre d’affaires ou disposant d’un bilan supérieur à 25 M€.
Ce train de mesures décale également le calendrier de mise en œuvre déplaçant d’un an les reporting prévus en 2006 et de deux ans les reporting prévus initialement en 2027
Parallèlement, la directive CS3D (Corporate Sustainability Due Diligence Directive), qui impose aux grandes entreprises un devoir de vigilance sur les droits humains et l’environnement dans leur chaîne de valeur, voit son entrée en vigueur repoussée d’un an, à 2028, avec une réduction de la fréquence des évaluations de diligence raisonnable, désormais prévues tous les cinq ans au lieu d’annuellement.
Experts-comptables : prescripteurs clés des achats locaux
Les experts-comptables, grâce à leur rôle de conseil et leur proximité avec les entreprises, se positionnent comme des acteurs stratégiques dans l’accompagnement vers la conformité CSRD.
« La CSRD pose le cadre d’un reporting extra-financier qui ancre véritablement la RSE au cœur de la performance des entreprises. Cette directive renforce de manière significative les exigences de publication d’informations en matière de durabilité pour faciliter la transition vers une économie durable. » (Source : Ordre des Experts Comptables)
La profession assume d’ailleurs son rôle d’exemplarité en s’engageant dans une labellisation Lucie 26000. Dans cette démarche, des actions concrètes vers les entreprises sont ou seront mises en place :
Formations dédiées à la CSRD pour accompagner la profession : webinaire « CSRD, tout comprendre sur la nouvelle règlementation européenne ».
L’Indice Breton de l’Achat Local : un outil clé pour aligner RSE et achats
Développé dans le cadre du projet Relocalisons.bzh, cet indice s’inspire de l’outil réalisé par l’UIMM dans le cadre de la Charte Industriel Engagé pour mon Territoire. L’Indice Breton de l’Achat Local est un indicateur permettant aux entreprises de mesurer leur part d’achats locaux. Son adoption représente un double avantage :
- Un levier de relocalisation pour renforcer les économies locales et limiter l’empreinte carbone.
- Une réponse concrète aux attentes de la CSRD en intégrant des données spécifiques sur la chaîne d’approvisionnement dans les rapports ESG.
Vers une automatisation des données
Le défi de la facturation électronique, qui sera généralisée à partir de 2027-2028, représente une opportunité majeure. Cette transformation permettra de collecter automatiquement des données précieuses, comme les codes postaux des fournisseurs, facilitant ainsi le calcul de l’Indice Breton de l’Achat Local et la mise en lumière des achats locaux.
Pour maximiser cet impact, une collaboration renforcée est nécessaire entre :
- Les experts-comptables, qui deviennent des prescripteurs d’achats responsables,
- Les éditeurs de logiciels comptables, pour intégrer des paramètres favorisant la localisation des achats,
- Les entreprises, prêtes à s’engager dans une démarche structurée
Si la directive “Omnibus” révise et simplifie la CSRD allège certaines obligations, elle ne doit pas faire oublier que la France a toujours été un pays pionnier en matière de reporting extra-financier. L’adoption précoce d’initiatives comme la Déclaration de Performance Extra Financière ou les démarches RSE territoriales a permis de structurer des pratiques vertueuses. Maintenir cette avance, c’est aussi garantir une meilleure résilience face aux évolutions économiques et environnementales à venir, grâce, notamment, à l’identification des risques et des actions à mettre en œuvre pour y faire face.
Quelques repères réglementaires de la CSR
La CSRD s’inscrit dans un contexte réglementaire qui impacte les entreprises quelle que soit leur taille. Vous retrouverez sur le site de BDI une frise synthétique de ces lois.
Voici quelques repères chronologiques utiles pour mieux cerner leurs implications :
- Directive Omnibus : février 2025 simplification de la CSRD
- Loi Sapin II (2016) : Introduit des obligations de transparence, notamment dans la lutte contre la corruption, impactant les pratiques d’achat éthiques.
- NFRD (2017) : Directive européenne transposée en France via la DPEF, imposant un reporting extra-financier pour les grandes entreprises.
- Loi PACTE (2019) : Introduit la notion de « raison d’être » et encourage les entreprises à contribuer aux enjeux sociaux et environnementaux.
- Décret BEGES (2020) : Étend le bilan carbone aux scopes 1, 2 et 3 pour certaines entreprises soumises à la DPEF.
- Loi ASAP (2020) : Facilite les achats publics en introduisant des clauses sociales et environnementales.
- Loi AGEC (2020) : Renforce l’économie circulaire, impose des objectifs de réemploi des emballages et limite les déchets.
- Green Deal européen (2020) : Cadre global visant la neutralité carbone, promouvant des pratiques d’achat local et inclusif.
- Loi Climat et Résilience (2021) : Fixe des objectifs pour une alimentation durable dans les marchés publics.
- CSRD (2024) : Remplace la NFRD et élargit les exigences de reporting ESG à davantage d’entreprises avec des normes standardisées.
- Stratégie Nationale Bas Carbone (2015 – objectifs en 2050) : Feuille de route française pour atteindre la neutralité carbone en 20250, intégrant la réduction des émissions dans les chaînes d’approvisionnement.