À Saint-Malo, il y a plus de vingt-cinq ans, un couple visionnaire lançait une aventure artisanale devenue un symbole de relocalisation avant l’heure. Vent de Voyage transforme depuis 2000 les voiles de bateaux en sacs, bagages et objets de décoration uniques.

L’idée était simple, mais révolutionnaire : redonner vie à un matériau technique, chargé d’histoire et promis à la destruction, en en faisant des créations durables, solides et élégantes.
Deux fondateurs, deux expertises complémentaires
À l’origine, Christine Defretin, architecte passionnée de design, et son époux Yann, marin de course au large pendant vingt ans, ont uni leurs savoir-faire pour créer un nouvel art de la transformation, celle des voiles de navires
Christine dessinait les modèles, tandis que Yann travaillait le cuir, les finitions et le matelotage à la main. Les voiles usées étaient récupérées directement sur les ports et dans les chantiers navals : une véritable chasse au trésor maritime.
Les débuts sont artisanaux (cinq sacs à vendre, une machine à coudre dans la boutique), mais le succès est immédiat. La presse bretonne s’empare du sujet, puis la reconnaissance nationale arrive lors du départ de la Route du Rhum 2002. Tokia Saïfi, alors secrétaire d’État au Développement durable, rend visite à la boutique. France 2 et Télématin relaient cette initiative bretonne avant-gardiste.
Vent de Voyage vient de lancer, sans le savoir, l’une des premières démarches d’upcycling textile en France.
Une entreprise durable et fidèle à ses valeurs
En 2021, ils passent la main à Pierre Rousseau, actuel dirigeant qui saura préserver l’identité de cette “pépite locale”. Vingt-cinq ans plus tard, Vent de Voyage reste fidèle à ses racines. L’entreprise, reprise il y a quatre ans, compte une dizaine de personnes, dont cinq couturières qui fabriquent tout localement.
Deux boutiques – à Saint-Malo et Dinard – complètent un atelier séparé depuis deux ans, dédié à la production.
Chaque année, plus de 30 000 m² de voiles sont ainsi sauvés de l’incinération ou de l’enfouissement. Ces textiles issus du pétrole retrouvent une seconde vie, transformés en pièces uniques.
Pour mettre en avant ce savoir-faire local, ils participent chaque année au salon Made in France à Paris, mettant ainsi à l’honneur le dynamisme breton.
Organiser l’approvisionnement et le structurer
Vent de Voyage a mis en place un réseau local de collecte : plaisanciers, voileries et clubs de voile de La Rochelle à Granville participent à la récupération des voiles en fin de vie.
La logique est circulaire et solidaire : la plupart du temps, les voiles sont échangées contre un sac ou une remise plutôt qu’achetées.
Cette démarche couvre environ 75 % du volume de matières premières.
Pour les compléments, la marque s’approvisionne toujours localement :
- L’accastillage chez un grossiste breton,
- Les cordages en Normandie.
Une carte affichée dans l’atelier indique l’origine de chaque matière. Une transparence rare dans le secteur de la maroquinerie.
60 % des achats sont réalisés en France, témoignant d’une cohérence forte avec la filière voile et les partenaires locaux mobilisés sur le territoire national.
Le choix de l’artisanat et du sur-mesure
Face à une concurrence qui délocalise souvent sa production, Vent de Voyage a fait un autre choix : tout fabriquer soi-même.
Ce positionnement haut de gamme repose sur la qualité artisanale et la personnalisation : près de 40 % des créations sont réalisées sur mesure, que ce soit pour des particuliers ou en marque blanche pour des cadeaux d’affaires.
Chaque sac porte en lui une part d’océan et de savoir-faire breton.
Un IBAL qui confirme le cap
Vent de Voyage poursuit son cap avec une stratégie claire : renforcer le digital, amorcer un réseau de distribution, et ouvrir ses portes au public via des visites d’atelier.
L’entreprise a également complété son Indice Breton de l’Aachat Local (IBAL), confirmant sa place dans la dynamique de relocalisation régionale.
Cet outil mesure la part réelle des achats effectués à différentes échelles territoriales. Le résultat met en avant un ancrage français remarquable : 60 % des achats sont réalisés en France, témoignant d’une cohérence forte avec la filière voile et les partenaires locaux mobilisés sur le territoire national. Avec 29 % d’achats effectués en Bretagne et 94 % en Europe, l’entreprise montre aussi sa volonté de rester au plus près de ses racines, tout en assumant les contraintes techniques liées à certains approvisionnements. Cet IBAL souligne la solidité du modèle de Vent de Voyage : une production locale, une filière courte, et une relocalisation pensée dans la durée.



